Article proposé par JeanClaudeGrognet, paru le 08/12/2017 07:50:26
Rubrique : Interviews, lu 3395 fois. 2 commentaires
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Portrait: FABIEN GUILLEMARRE, simple et authentique


 

 

           

FABIEN GUILLEMARRE... & MARIE DO

 

Jim Horlaville Président Fondateur (photo AASM)

        

         Faire une interview avec Fabien, c'est comme défiler devant une grande galerie de portraits de tout ce qui a fait et fait encore le quotidien de la discipline aujourd'hui. Normand, il a toujours vécu dans l'extrême Est de la région, comme sa famille, dans la Vallée de la Bresle, à la frontière de la Picardie, plus précisément à Aumale situé à une quarantaine de kilomètres de Conty.

 

 

 

La Normandie de son enfance a été la première région de France à se doter d'une association d'attelage, l'Association d'Attelage de Seine Maritime. Cette dernière a fêté cette année son 30ème anniversaire.

Fabien: " Il y a toujours eu des chevaux à la maison, mon père a été l'un des précurseurs de l'attelage en France. Il a débuté avec Jim Horlaville et a passé ses examens avec Patrick Rébulard. Il faisait les petits concours de la région avec un cheval trotteur. Le règlement le permettant, j'étais sur sa voiture comme groom sur les maniabilités. Ces photos donnent une idée des concours de l'époque. »

 

 

 

 

 

 

 

 

 

         « J'ai un peu monté un cheval mais hors compétition. Je faisais des chasses à courre en forêt d'Eawy avec mon père. Aujourd'hui je ne chasse plus. Ma mère et mon père se sont rencontrés sur un terrain de concours. Ils faisaient tous deux du CSO. Mon père a appris l’attelage par lui-même, à l'époque il n'y avait pas d'école d'attelage. Avec un ami, Jean-Louis Cosson, ils se sont instruits dans les livres, ils ont acheté le matériel et les voitures dans des brocantes. C'est en regardant les photos qu'ils réglaient les harnais... Bien sûr ce matériel n'était pas en bon état, les harnais et les voitures cassaient souvent. Nous sommes une famille « de chevaux », ma mère est sur tous les concours, c'est elle qui encore aujourd'hui s'occupe de l'entretien des chevaux au quotidien. »

 

« Mon frère, ma mère, mon père. On a toujours attelé en famille, cette photo a été prise au Tréport. A droite de la photo en arrière-plan Monsieur Raoul Lemonède, il menait à quatre chevaux, formé lui aussi par Jim Horlaville. »

         « J'ai débuté l'attelage chez Jean-Jacques Petit a Auffay à la ferme de la Corbière. Plus tard Jean-Jacques m'a prêté ses deux chevaux polonais (1994) durant ses cours. Par la suite, c'est Michel Mauchien qui habitait à quelques kilomètres de la maison qui a continué mon perfectionnement à l'attelage. Michel Mauchien est aujourd'hui en Provence, il y anime l'attelage et il est également juge. »

         " Voici une photo de l'un de mes premiers concours où je n'avais droit à participer qu'à la maniabilité et au dressage...mon père ne voulait pas que je fasse le marathon. Un concours comme on les faisait à cette époque. J'avais 11 ou 12 ans. C'est mon frère plus jeune que moi qui fait le groom devant Tommy, un poney New Forest que mes parents m’avait offert. C'était à Rieux à côté de Blangy sur Bresle. Le concours était organisé par Philippe Lefèvre chez lui. »

         « Il y avait une multitude de petits concours locaux dit « d’entrainement », où il n'y avait pas besoin de papiers pour les chevaux ni de « galops » pour pouvoir participer."

Concours à Rieux avec une voiture Binder, un tilbury sur lequel mon père avait demandé à François Dutilloy de monter des roues métalliques.

         « Sur la photo suivante, je suis avec mon père sur une voiture Attelage Diffusion de Monsieur Rebrassé. Jim Horlaville avait insisté auprès de mon père pour que je fasse le marathon, ce que mon père refusait jusqu'alors absolument. Grâce à Jim, j’ai ainsi pu faire les 3 tests pour la première fois au concours du Mesnil David chez Michel Mauchien. »

                       Avec mon père, premier concours complet.                          Un peu plus tard à Derchigny, près de Dieppe. Un concours organisé par Thierry Beck

         « Tommy n'avait pas de papiers, mais c'était un chouette poney. Son père étant mort, les haras nationaux n'ont pas voulu lui attribuer de papiers. Je ne pouvais donc faire que des concours d’entrainement. C'est à Derchigny que j'ai rencontré pour la première fois Fabrice Martin. J'avais auparavant participé comme bénévole au concours de Cany Barville, et j'avais très envie de participer aux prochaines manifestations de ce concours. Sachant que Fabrice avait un club pas très loin, je lui ai dit d'emblée et sans retenue : « l'année prochaine je veux faire Cany Barville ! » »

         « Je suis allé prendre des cours chez Fabrice pendant une année, j'ai passé mon Galop 8 qui était à l'époque obligatoire pour mener à 2 chevaux en compétition. Il m'a aussi trouvé la voiture et une paire de Mérens qui venaient de l'attelage à quatre de Jean-François Chanteur. Sylvie Avenel avait récupéré l'autre paire. C'est Fabrice qui m'a mis en route sur les concours nationaux et sur les CAI. L'année suivante, j'étais à Cany Barville.

 

Fabien, Marie Dorothée et Apolline au concours de Blangy s/Bresle en 2016 et le magasin d’Aumale.

 

Marié avec Marie Dorothée, que l'on appelle familièrement "Marie Do", le couple a 2 enfants, Théodore 7 ans et Apolline 2 ans. Fabien est avec son frère à la tête de l'entreprise familiale, un commerce de quincaillerie et fournitures industrielles à Aumale et Eu.

Fabien: "Mes chevaux sont chez mes parents, ils sont à 3 km de mon domicile. Nous avons acheté une maison dans laquelle nous faisons des travaux, et nous y logerons les chevaux plus tard. Pour le moment je n'arrive à les atteler que trois jours par semaine. Le reste du temps c'est ma mère qui les travaille à pied. Je donne priorité à la famille et au bon fonctionnement de l'entreprise qui prend beaucoup de mon temps. »

« Entre les poneys et ma paire de chevaux d'aujourd'hui il y a eu une période creuse, à la recherche de chevaux, et quelques échecs avec des chevaux polonais. Mais j'ai continué à me perfectionner avec Benjamin Aillaud, il a tous mis en œuvre afin que je passe à 2 Chevaux, quand il était encore aux Elfes Blancs. Je descendais à Montauban toutes les deux semaines pour travailler avec les chevaux de Benjamin. »

         « Aujourd'hui je dispose d'une belle paire de 9 et 11 ans, des Guelders (Dion et Barichello), mais le niveau international dans cette catégorie est très élevé. De l'amateur 1 à Elite il y a une marche, mais de Elite aux CAI c'est une falaise ! Ce n'est plus de l'amateurisme comme j'avais pu connaître avec les poneys. »

         JCG: te voilà tout de même à la porte de l'Equipe de France...

         F.G: " (rires). Cette année il me manquait le cheval de réserve, Vincent SERAZIN m’a prêté un de ses chevaux (Acthel), j’en profite d’ailleurs pour le remercier de m’avoir aidé et fait confiance mais je n'ai pas été sélectionné. J'ai pris cela comme un échec, j'avais tout fait pour aller à Lipica. Il me manque peut-être un peu de succès à l'étranger, c'est vrai que je n'ai pas une grosse expérience. Il y a deux ans à Horst j'ai été très surpris par l’aspect très technique des marathons comme on n'en voit pas en France. Il faut des chevaux très en ordre pour passer vite dans des endroits très étroits. Sortir à l'étranger est important pour être compétitif à haut niveau. Je continue le travail avec Fabrice qui est plus qu'un coach : c'est un ami que je respecte beaucoup. Il vient régulièrement à la maison et je vais aux stages de Lamotte si je suis disponible. Félix Brasseur renseigne Fabrice de ce qu'il a pu observer sur l'attelage, et vice versa, on fonctionne comme ça, et j’apprécie ces échanges avec Félix et Fabrice. Ensuite, avec Fabrice nous faisons une synthèse et essayons de trouver des solutions aux problèmes vus par Félix. Fabrice a beaucoup évolué dans sa façon de travailler et dans son rapport avec les chevaux. Il sait voir les améliorations si petites soient-elles.

         Il est également très patient. Il continue de travailler un cheval même si ce dernier peut présenter des défauts ou des comportements rédhibitoires. J'aime bien cet état d'esprit, contraire à la recherche permanente d'un autre cheval dès que des difficultés apparaissent. Il a toujours fait avec les moyens et les chevaux qu'il avait, ça se ressent dans son travail. Résoudre les problèmes, ou savoir les cacher, est beaucoup plus enrichissant que de changer de cheval à tout prix. J'aime travailler dans la durée.

         J'ai fait le constat que mes chevaux sont plus appréciés à l'étranger qu'en France. C'est aujourd'hui mon gros problème, et c'est la raison pour laquelle la saison 2018 je la ferai plus à l'étranger qu'en France. Je ferai Lisieux pour débuter la saison, Horst et Saumur… puis nous verrons. Le championnat de France cette année m'est resté sur l'estomac, non pas par le classement mais par les notes de dressage... A l'étranger on vient me demander des renseignements sur les chevaux, ma note de dressage à Beekbergen 2017 était de 55 points toujours avec une petite faute de pas. Les protocoles de dressage de certains juges en France je ne veux même plus les regarder."

2017 Beekbergen, une belle symétrie des chevaux

Saumur! regardez bien, au dessus du dos des chevaux... la tête du coach, Fabrice Martin

         " Fabrice vient une fois par mois à la maison. On a travaillé que le dressage, et aujourd'hui que les choses vont mieux et que les chevaux se sont calmés nous allons faire un peu de travail sur la maniabilité. A une époque je préférais nettement le marathon, mais plus j'avance plus je prends de plaisir avec le dressage. Cette année les chevaux m'ont donné beaucoup de plaisir sur les reprises, j'ai eu de très bonnes sensations, notamment à Beekbergen sanctionnés par la note que j'imaginais: 55. Je n'ai certainement pas des chevaux pour espérer les 40 points, mais avec encore du travail je peux tendre vers les 50.

         Ces chevaux-là, on va les exploiter, je vais continuer à apprendre avec eux, et surtout rechercher les solutions aux problèmes sans mettre la main au portefeuille. En plus, je prends du plaisir à les mener et ils sont faciles à vivre au quotidien. Je n'ai pas de sponsor, tout est en famille et en fonds propres.

 

Sur les marathons ça décoiffe! Marie Do est à chaque fois du voyage.

         JCG: et les indoors ?

         F.G: " surtout pas avec mes chevaux ! Et puis les indoors, je ne suis pas pour ce genre d'épreuves, pas plus que les "Duels" d'ailleurs. Je ne m'intéresse pas à la Coupe du Monde de la FEI, je suis cette compétition de très loin. J’admire les meneurs pour leur technicité et la rapidité d’exécution du maniement des guides, mais ça ne m’intéresse pas de voir des chevaux galoper. Je trouve ces épreuves très dangereuses pour les amateurs.

         Voilà une opinion bien tranchée, c'est un trait caractéristique de la personnalité de Fabien.

         © Interview JCG

 

 

 


  Commentaires
-Les enjeux sont ouverts...qui dit mieux ? par VICO (09/12/2017 06:54:12)
La Normandie n'est plus la région à posséder la plus ancienne association d'Attelage. Elle est battue par la Franche-Comté avec son "Association Franc-Comtoise d'Attelage " communément appelée "AFCA" qui a été créée en 1982 et à ce jour est âgée de 35 ans. Qui dit mieux ? Les paris sont ouverts. Cordialement.
-Bien, bien... par JeanClaudeGrognet (09/12/2017 08:13:29)
Effectivement on attribue à la Normandie la première association d'attelage, comme l'on attribue à la Picardie, au Haras de Compiègne et à son Directeur Adrien Drion, la naissance de l'attelage sportif. Auriez vous quelques documents à nous communiquer sur l'association AFCA de l'époque ? Merci