Article proposé par JeanClaudeGrognet, paru le 17/06/2021 20:27:23
Rubrique : L'attelage de Tradition, lu 2467 fois. Pas de commentaires
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VENTE BECKER, vente du siècle ?


 

 

                                                                                                                                                    

Maître Biget et Maître Nowakowski

33 Rue Demées, 61000 Alençon

02 33 32 00 02 et  contact@orne-encheres.fr

Site web: https://www.interencheres.com/61001

                                                                                                      

               Le 13 juillet va se dérouler en Belgique une vente aux enchères sous le marteau de la Société DAGUERRE et dont l’ensemble de l’expertise a été confié à Maître Patrice BIGET.

Cette vente au caractère exceptionnel, des voitures hippomobiles collectionnées par Monsieur André Becker est certainement la collection la plus importante que l'on ait connue depuis la dispersion de la collection de Madame Dina Verny qui ne s’est toutefois pas faite à l'occasion d'une vente aux enchères.

          Depuis la disparition d'Yves DAUGER, que Maître BIGET connaissait depuis près de 30 ans et avec qui il a préparé et organisé quelques ventes de voitures hippomobiles et de matériel s’y rapportant, Maître BIGET se retrouve de facto être le commissaire-priseur spécialiste du sujet.

C’est d’ailleurs pour cette raison évidente que la dernière vente  de voitures d'attelage de la Collection PIVETEAU qui vient tout juste d’avoir lieu lui a été confié. Vente organisée par la Société ORNE ENCHERES sous le marteau de Maître BIGET comprenant environ 70 attelages et divers matériels, dont attelage.org s'est fait l'écho.

"L’ATTELAGE", Maître Biget connaît bien, il élève des chevaux percherons pour l'attelage  en Normandie, et il a été longtemps juge pour les Haras Nationaux : c'est un fervent  partisan de l'allègement de la race. Il est lui-même meneur, et  pour la petite histoire il se forme aujourd'hui à la conduite de l'attelage à quatre chez Maxime Maricourt.

          Évidemment il rencontre et connaît bien le petit monde qui alimente et enrichi l'histoire de l'attelage et la voiture hippomobile : Monsieur Jean-Louis LIBOUREL Conservateur du patrimoine, Andréas FURGER spécialiste suisse, Patrick MAGNAUDEIX ...

           Aujourd'hui Maître Biget, Expert en objets d'art et Expert  auprès de la Cour d'Appel de Caen est mandaté pour l'expertise et l'organisation de la collection André Becker. Cette collection est la plus grande collection européenne, et nous avons voulu en savoir plus.

          attelage.org : Qui était Monsieur André Becker?

            Maître Biget : « Monsieur Becker était un industriel de la région parisienne, qui a notamment inventé la tente "Igloo", avec laquelle  il a fait fortune. Monsieur Becker était un collectionneur passionné, et particulièrement passionné des voitures hippomobiles et des camions militaires. Prestigieuses ou modestes il lui importait surtout que les voitures soient plutôt rares. Sa collection a débuté dans les années 1970. Monsieur Becker avait emmené sa collection en Belgique il y a une dizaine d'années. Il y a 40 ans qu'il n'y a pas eu une vente avec une telle quantité et une telle qualité de voitures, une centaine environ. Il y a 300 lots dans cette vente. Dans la collection Becker il y a quatre voitures qui proviennent de la collection Dina Verny ».

          « Une partie de mon travail et de retrouver le pedigree des voitures. Ce n'est pas le cas pour beaucoup, mais pour certaines on peut en effet retrouver les différents propriétaires. André Becker avait par exemple acheté des voitures dans un couvent italien. Il y aura dans la vente de juillet, une voiture exceptionnelle à trois roues, une Tre Ruote, attelable à un cheval, fabriquée à Pavie par un carrossier italien Antonio Boticella dans les années 1800. Elle est en bon état et d'après Jean-Louis Libourel l'unique modèle existant au monde. La mise à prix de cette voiture se situera aux environs de 30.000 à 40 000 €, ce qui n'est pas une somme démesurée pour une pièce unique. Cela n'a rien de comparable à ce que l'on peut trouver dans l'automobile de collection ».

          Dans le même couvent en Italie André Becker a acheté une grande berline de voyage autrichienne qui appartenait à l'Empereur d'Autriche.

 

"Berline, Autriche, début XIXème. Cette voiture a fait partie du train de François 1er Empereur d'Autriche et roi de Lombardie Vénétie lors de son entrée à Milan, le 31 décembre 1815."

"Berline de ville. Epoque fin XVIIIème, style néoclassique. Travail français vers 1780. Ancienne collection Dina Vierny

 

          Il y a également dans la collection plusieurs voitures extraordinaires qui sont des voitures de deuil portugaises du XVIII ème et début XIX ème. Ce sont des espèces de grands carrosses utilisés pour les grandes inhumations princières, attelés de quatre ou six chevaux et pouvant transporter la famille du défunt. Elles viennent de la collection Magno  à Lisbonne. Ces voitures ont été retrouvées en janvier 1934 lors d'un défilé de voitures hippomobiles ». 

 

Grand corbillard de première classe. Fabricant : Quesnel, carrossier à Bruxelles.                  Grande calèche de deuil. Portugal, XIXème. (ex collection Magno)

 

Berline de deuil. Proviennent de l’entreprise de pompes funèbres Magno à Lisbonne

 

          « Il y a aussi au catalogue le coupé de la princesse de Lamballe. La voiture aurait servi pendant la révolution française à évacuer l'aumônier de Marie-Antoinette. Cette voiture a été vue à l'Exposition Universelle de 1900 à Paris. Il appartenait à cette époque à Lady Foster. Provenance château de la Bourbansais, en Bretagne ».  

 

Grand coupé de voyage dit de la princesse de Lamballe. D'après une tradition familiale non fondée, cette voiture fut prêtée par la princesse de Lamballe, amie de la reine Marie-Antoinette à son confesseur l'abbé de la Coninais afin que ce dernier puisse fuir Paris. Il abandonne la voiture près de Dinan avant de regagner l'Angleterre où il meurt 3 ans plus tard.

          « Une autre rareté de la vente est un omnibus public, que l'on appelle familièrement la Madeleine-Bastille. Elles pouvaient contenir 40 personnes, elles étaient généralement tirées par trois chevaux percherons. C'est la CGO, la Compagnie Générale des Omnibus qui géraient les attelages parisiens. La CGO faisait fabriquer ces voitures, elles étaient connues dans le monde entier. Dans les tableaux qui représentent la Belle Époque il y a souvent un omnibus dans le décor. Il y a eu des copies de faites pour le cinéma, mais parmi les authentiques, je pense que celle de la collection Becker est l'une des dernières. Il y en a eu une au musée de la voiture du château de Compiègne, je rêverais de voir cette voiture achetée par la Ville de Paris ou par le musée Carnavalet. Dans l'inconscient populaire mondial, lorsque l'on parle des rues de Paris de 1900 ce grand omnibus et souvent évoqué ».

  

          Omnibus public, Hôtel de ville Versailles. Paris vers 1880. 40 places assises. Trois chevaux de front             Diligence MENDE BAGNOLS. Epoque fin XIXème. Trois compartiments.

 

          «Nous aurons beaucoup d'enchérisseurs et de spectateurs car la Belgique est traditionnellement un pays d'attelage. C'est probablement le pays européen qui détient le plus grand nombre de chevaux d'attelage et de collectionneurs tel le défunt baron Casier. J'invite les meneurs français de la tradition ou du sport de venir voir cette collection. Anhée n'est qu'à trois heures de Paris, dans les Ardennes belges, c'est une belle région très touristique.

          Il y aura à la vente avec les voitures, dont un coach de Guiet équipé de toilette intérieure,

 

Road Coach. Fabricant : Guiet & Compagnie, carrossier à Paris. Rare présence d'un vase de commodité intégré dans un des sièges intérieurs

 

                                                   

Coupé Mulhbacher                                                                                                                                       Grand Coupé de voyage

Petit Coupé de ville. Fabricant : Mulhbacher à Paris. 2 chevaux. Roues Rare système d'éclairage intérieur électrique (d'origine) pour pouvoir lire! On a fait construire des voitures jusqu'à la guerre de 1914, et à cette époque ont préférait dans les grandes familles sortir en ville dans un grand coupé plutôt que dans une voiture.

Grand coupé de voyage dit de Chateaubriand. Fabricant : Luigi Rossi à Turin, carrossier du prince de Savoie-Carignan. Faussement attribué à Chateaubriand lors de la vente du 18 juillet 1993 à Saumur, ce coupé de voyage appartenait au comte de Sales ambassadeur des Etats Sardes à Paris de 1829 à 1836. Armoiries de la famille de Sales en métal argenté (en applique sur les panneaux de portières). Provient de l’ancienne collection Dina Vierny.

 

Rare coupé de voyage dit "BASTARDELLE". Epoque Empire, vers 1805, marqué sur les lames de ressorts BONEBERGE à Lyon. Voiture classée monument historique en 1982. Elle a appartenu à François-Raymond Chastel marchand d’indiennes (tissus imprimés) à Lyon sous le 1er empire. Restée dans la famille Chastel jusqu’en 2006, date où elle a été achetée par Monsieur André Becker lors d'une vente à Saumur le 11 juin 2006. NB: vendue sur désignation du fait de son statut, cette voiture ne peut quitter le territoire National français.

          Il y a aussi au catalogue des voitures plus modestes,  Milord, Petit Duc , Phaëton, Traineaux, petites voitures d'enfants, des lots d'accessoires, costumes de postillons, quelques harnais, de très beaux livres anciens sur l'attelage, une trentaine de catalogues, certains rarissimes de carrossiers du XIXème, deux albums du photographe Delton faits à la requête de Muhlbacher un des grands carrossiers parisiens, des appendices de l'encyclopédie Diderot et d' Alembert consacrés à la sellerie et à la carrosserie, des lanternes de tous types, dont une paire de lanternes de gala de 86 cm avec la couronne royale probablement d'une voiture de Charles X ou Louis-Philippe, une barre de carrick à pompe rarissime, voiture à chien , voiture à chèvre, voitures pour transporter les oies... »

           « Un petit mot concernant la restauration des voitures anciennes. La France a beaucoup perdu de savoir-faire dans le domaine de la restauration. Il y a un restaurateur en France qui a encore de l'importance c'est Dominique Posselle. C'est lui d'ailleurs qui a assuré la préparation des voitures de la vente. Il faut savoir qu'une restauration de qualité coûte cher. D'autre part une voiture restaurée ne garantit pas aux propriétaires de « retrouver son argent ». Il ne faut pas considérer la collection de voitures hippomobiles comme un  placement à but lucratif. La collection est un pur plaisir, que ce soit la collection des voitures hippomobiles ou tout autres collections. Quel plaisir n'est-ce pas de mener un joli cheval dans une belle voiture ? Cela dit il vaut mieux dans tous les cas ne pas restaurer que de faire une mauvaise restauration. Une voiture c'est un objet d'art dont on se sert. On peut refaire plusieurs fois par exemple la peinture, ce n'est pas grave, à la condition que ce soit fait dans la tradition.

          Becker faisait assez peu restaurer, lorsqu'il le faisait, il le faisait avec son propre menuisier dans la tradition.

          Nous allons proposer le catalogue de la vente à un prix qui sera modeste. Ce sera un catalogue spécialement luxueux, qui pourra être conservé dans la bibliothèque comme ouvrage de référence. L'achat se fera en me contactant en l'étude ou en contactant la société Daguerre partenaire de cette vente ».

© interview JCG/attelage.org

 

 

 

 

          NDLR : on peut voir un omnibus MADELEINE-BASTILLE au musée du Château de Compiègne

 

Photo (C) RMN-Grand Palais (domaine de Compiègne) / Daniel Arnaudet

          Petite histoire de l'omnibus parisien

           Les omnibus apparaissent à Paris en 1828. A la différence des voitures de louage, ils circulaient selon des itinéraires fixes sur des lignes régulières, marquant, après une éclipse de 150 ans, la renaissance des transports en commun dans la capitale.

          C'est en 1853 que furent mises en circulation les premières voitures dotées de places d'impériale, inspirées de celles de Londres. Attelé à trois chevaux menés par un cocher, cet omnibus pouvait transporter jusqu’à 40 passagers: 16 à l'intérieur, 20 sur l'impériale et 4 sur la plate-forme arrière. C’est là que se tenait le conducteur, chargé de faire monter et descendre les passagers et d'encaisser leur paiement.

          La ligne Madeleine-Bastille, qui était l'une des plus fréquentées, fut popularisée par les peintres, caricaturistes et écrivains. Comme Octave Mirbeau, qui, raillant l'impossibilité de trouver place dans les omnibus bondés, conclut le comte en attendant l'omnibus par les lignes suivantes: « Les Français ont pris la Bastille, c'est possible... Mais ils ne sont pas fichus de prendre l'omnibus Madeleine-Bastille...(...) ».

          Supplantés par les tramways dès 1900, les omnibus disparurent vers 1910, remplacés par les autobus.

Compiègne, musée de la voiture

http://palaisdecompiegne.fr/un-palais-trois-musees/le-musee-national-de-la-voitu...

 

          © interview JCG/attelage.org


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