Article proposé par Heliosness, paru le 04/09/2016 08:37:42
Rubrique : Reportages, lu 2171 fois. 2 commentaires
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BREDA Chpt du Monde, FELIX BRASSEUR mon premier interview !


 

        

 

 

 

 

         Félix-Marie Brasseur, l’entraîneur de l’équipe de France, a eu la générosité de m’accorder un entretien à l’issue de cette journée de championnat du monde à Bréda, journée la plus éprouvante, tant pour les chevaux que pour les meneurs.

         Tout au long de cette journée, j’ai croisé F-M Brasseur sur son vélo, précis, calme, serein, suffisamment détendu pour sourire, pour un bref échange. Il est là, qui observe, qui va et vient pour tout superviser. Un homme qui, à l’évidence, sait ce qu’il fait, ce qu’il a préparé et ce qu’il attend. Un homme qui ne doit pas se laisser déstabiliser facilement, même par l’accident de Thibaut Coudry, un pilier de l’équipe, à l’obstacle 2. Un entraîneur national qui a fait travailler son équipe pour décrocher, sinon un podium, du moins la quatrième place. L’équipe n’est pas si loin du compte puisqu’elle se situe pour l’instant à la 6è place, mais je sens qu’il est un peu déçu, même s’il sait que toutes les conditions n’étaient pas parfaitement réunies.

         Mais, il en a bien conscience, il faut encore du travail. Un attelage de quatre chevaux n’est pas si facile à constituer Il ne s’agit pas de mettre ensemble n’importe quels chevaux. Il faut tenir compte d’un ensemble de facteurs et surtout, il faut obtenir la confiance des chevaux, leur demander mais en leur donnant. Monsieur Brasseur me dit qu’il entraîne personnellement les chevaux trois fois par jour. Le fait est que je l’ai vu revenir en voiture d’attelage avec un cheval de réserve de Thibaut qu’il a fait travailler lui-même. Il n’y a pas tant de secrets que cela. Avec les chevaux, il faut être présent, s’en occuper, apprendre à connaître la personnalité de chacun pour savoir comment les appairer, les sortir en solo, en paire, à 4. Connaître leur « langage », savoir obtenir d’eux le maximum sans jamais les brusquer, ni user de violence ni crier. C’est effectivement déplorable de constater que, même à ce niveau de compétition, des meneurs pensent qu’il est justifié de fouetter, brusquer, pour ne pas dire malmener leurs chevaux. Heureusement, estime-t-il, sur un marathon aussi technique, aussi difficile, qui correspond au niveau d’exigence d’un championnat du monde, ceux qui n’y ont pas leur place sont très vite placés face à leurs insuffisances.

         M’étant placée à côté de F-M Brasseur à l’obstacle 7 lors du passage de Benjamin, j’ai assisté à cette connivence qui existe entre l’entraîneur et les chevaux, sa réactivité instantanée à une légère défaillance, son anticipation aussi, uniquement en usant de sa voix. Il a quelque chose de très rare, je ne suis pas certaine qu’il le sache d’ailleurs, ce que l’on nomme un ‘singing formant’. C’est une fréquence vocale que certains chanteurs lyriques possèdent. Les vocalisations sont portées par des fréquences vocales qui constituent les harmoniques, la fréquence du singing formant permet à la voix de passer par-dessus toutes les autres et de porter loin. Cette qualité s’accompagne d’une richesse en formants qui rend la voix harmonieuse, musicale, dense, mélodieuse, pleine. Elle confère une autorité, un ascendant naturel sur celui qui la perçoit. Et ça marche, les chevaux lui obéissent, où qu’il soit.

         Le choix des meneurs est pleinement justifié, me dit-il. De fait, Sébastien Vincent, qui n’est pas un spécialiste du dressage, m’a époustouflée au marathon. Il y va, il donne, il mène. Puisque, pour chaque type d’épreuve, ce sont les deux meilleurs résultats obtenus par les meneurs qui sont additionnés, celui qui est un peu plus faible en dressage ne pénalise pas ses coéquipiers, il sera, lui-même, le meilleur au marathon. Il est 19è, cinq places devant Benjamin Aillaud, qui n’a pas démérité pour autant, loin s’en faut, si l’on tient compte du fait que les arabo-frisons, les timoniers surtout, n’ont pu assurer le rythme nécessaire que jusqu’au cinquièmes obstacle. Ensuite, Benjamin a été tenu de les laisser ralentir un peu.  Il n’a pu éviter la faute dans le 8è obstacle, qui lui a fait perdre quelques places, sans doute, puisqu’il a dû aller faire une volte pour passer une porte (conversation avec Benjamin). Benjamin a le potentiel pour améliorer ses performances et devenir un atout pour l’équipe tant en dressage qu’en marathon.

         Alors monsieur Brasseur est content, et les spectateurs également car c’est un très beau spectacle que les meneurs nous ont offert à l’occasion de ce marathon. C’est vrai qu’il est important, pour leur mental, et juste, de les soutenir et de les féliciter mais F-M Brasseur ne laisse rien passer pour autant et dit aussi ce qui ne convient pas, les objectifs qui ne sont pas atteints. Il faut être lucide, il y a déjà tellement de facteurs extrinsèques qui entrent en lice dans un concours !

         J’ai tenu à savoir pourquoi la fédération avait choisi de limiter le nombre des meneurs à 4 dont 3 seulement constituent l’équipe de France, alors que nous pouvons en avoir 6. Faute d’équipages déjà constitués ayant deux qualifications. La FEI ne déroge pas à cette règle. Horde est donc resté sur le carreau ainsi que Sébastien Mourier et François Vosgel, entre autres.  Les meneurs qui ont les qualités pour faire partie de cette équipe n’en ont pas forcément les résultats. Il faut se plier aux règlements. Le talent est en France, mais les moyens ? Peut-être que l’IFCE pourrait remplir ce rôle de former des attelages, de les entretenir. Tout cela coûte très cher et la stabilité, la continuité, nécessitent des infrastructures et du personnel qu’un meneur ne peut pas assumer seul.

Sur ce, à demain !

Heliossness


  Commentaires
-Merci ! par Renata (04/09/2016 09:41:57)
C'est un régal de vous lire !
-merci par Heliosness (04/09/2016 23:30:17)
merci Renata