Article proposé par JeanClaudeGrognet, paru le 15/02/2009 20:39:41
Rubrique : Les références > Dressage : technique, lu 5300 fois. Un commentaire
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De l'achat du cheval au Championnat du Monde... un long chemin (1/5)


 

 

Le chemin est long de la coupe aux lèvres… Il faut en principe, et généralement quelques semaines pour mettre un cheval de selle à l'attelage. Il faudra quelques mois pour qu'un cheval docile et pas très compliqué devienne un cheval d'attelage de loisir.  Il faut un peu plus de temps pour donner des rudiments de menage à une personne déjà habituée aux chevaux. Il faudra 3 ou 4 années de travail pour que le cheval à vocation sportive parvienne à maturité.

JCG

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par Tjeerd Velstra, Champion du Monde en 1982 à Apeldoorn

       

Tjeerd Velstra avec des chevaux de la race légère néerlandaise WPN

 

         Réunir un attelage à quatre est une tâche ardue. Il ne suffit pas simplement d’acheter cinq chevaux et d’en faire un attelage à quatre, ni deux ou trois pour un attelage à deux, bien que ce soit un peu plus facile. Le plus simple est l’attelage à un.

         Si le cheval va bien attelé seul, il se laisse toujours bien mener et il ne doit en plus être en harmonie avec aucun autre. Avec un attelage à quatre, c’est une question de chance que de trouver quatre chevaux qui concordent également du point de vue du caractère. Ils doivent s’adapter les uns aux autres, ils ne doivent pas avoir peur lorsqu’un timonier, dans une conversion serrée, touche les postérieurs des chevaux de volée ou lorsque le palonnier est appuyé contre les postérieurs.

         N’importe quel cheval doit tout d’abord s’habituer à ces situations dans l’attelage à quatre. On ne peut s’attendre à ce que le cheval effectue son travail parfaitement dès le début. L’accoutumance prend du temps, beaucoup de temps; ils faut de longs mois de travail jusqu’à ce que les chevaux soient à l’aise dans l’attelage.

         Avec des images déjà publiées dans les revues ACHENBACH, j’aimerais démontrer que les diverses races de chevaux, de tailles différentes, sont capables de fournir des résultats de pointe. A l’appui de ces faits, nous devons reconnaître qu’à vrai dire toutes les races de chevaux qui se prêtent au sport hippique de compétition font également preuve de beaucoup d’engagement dans le sport d’attelage.

 

A la recherche d’un cheval d’attelage


lipizzans….                                                             welsh cob …

         Qu’est-ce que j’attends d’un cheval? Une condition préalable est certainement donnée, notamment qu’un cheval doit se comporter avec calme dans l’attelage et marcher énergiquement en avant, Il n’est évidemment pas si simple de trouver de tels chevaux.

         Je mène pour l’instant des produits issus de l’élevage hollandais, le cheval Warmbloed Paarden Stamboek Neederland WPN, une très bonne race. Ces chevaux se prêtent très bien à l’attelage, bien qu’ils soient élevés comme chevaux de selle. Je suis certain qu’on a intérêt à acheter pour le menage des chevaux qui conviennent pour la selle. Avec cette position de départ, la voie vers l’attelage est déjà tracée; chaque cheval exige cependant beaucoup de patience jusqu’à ce qu’il soit habitué à sa nouvelle aire de travail, l’attelage.


welsh cob

Quel doit être approximativement l’aspect du cheval

         C’est évidemment différent si on possède déjà un cheval ou non. Celui qui a déjà un cheval doit un peu s’adapter à lui s’il ne veut pas le vendre. Pour l’attelage, les chevaux peuvent être grands ou petits; je préfère personnellement les grands, entre 166  et 170cm au garrot. Je reviendrai plus tard sur les petits chevaux.


         Les chevaux d’une certaine taille ont l’avantage de faire de grands pas de par leur mouvement et d’être généralement plus forts. Si je place leur poids dans le harnais, ils décollent la voiture sans effort supplémentaire. Ce qui peut s’avérer déjà plus difficile avec des chevaux petits ou trop légers. Les grands chevaux doivent cependant se mouvoir avec légèreté et élégance. Un grand cheval à la carrure lourde, qui a des jambes et des sabots pesants et est de par cela moins élégant en mouvement, s’il se déplace en plus avec beaucoup de remous et de bruit, n’est pas le bon cheval pour moi. Il faut tâcher de trouver des chevaux de sang avec quelque peu d’influence pur-sang (sans cependant dépasser les 25 à 30%, car ils ont alors tendance à être nerveux).

Je recherche donc des chevaux élégants avec beaucoup de pas, de préférence se méjugeant de 20 à 30 cm, c’est-à-dire que le sabot postérieur dépasse le sabot antérieur de 20 à 30 cm (ce qui est facilement vérifiable en terrain tendre). Les chevaux doivent avoir un trot léger, ample et élégant. Une trop grande amplitude des mouvements peut cependant être parfois un désavantage, car le cheval ne peut souvent plus allonger beaucoup: lorsqu’il doit accélérer l’allure, il commence à trotter irrégulièrement; ne pouvant pour cette raison plus allonger, il trouvera une issue en galopant. Les chevaux qui ont un mouvement naturel rapide sont la plupart du temps des chevaux qui peuvent être entraînés à une grande endurance sans qu’ils investissent leur substance dans des actions non naturelles et se fatiguent ainsi rapidement.

         Le cheval doit avoir une belle position naturelle. Lorsqu’il est présenté à la main, encolure doit être bien relevée, un beau port avec une encolure décontractée, donc tout à fait tranquille et moelleux jusqu’à la bouche. Le cheval doit observer toute l’affaire d’un grand oeil sombre.

 

kladruber

 

 Comment trouver de tels chevaux, où faut-il les chercher et comment procéder?

            En Hollande, on peut observer des chevaux lors des nombreux concours ruraux par exemple; ou alors, si j’entends dire qu’un cheval adéquat se trouve quelque part, je prends la route et vais le voir. Pour moi, un cheval doit toujours être bai et avoir le moins de taches blanches possible; tout au plus aux jambes, mais pas à la tête, car je trouve «une tête toute blanche)> peu intéressante. Un cheval avec une grande liste ou pelote se tait tout de suite remarquer en dressage lorsqu’il bouge la tête. Plus la tête est foncée et mieux c’est.
        

         J’ai ainsi exprimé quelques unes de mes idées concernant l’extérieur. Je préfère les chevaux qui ont déjà été quelque peu montés et qui sont âgés de 4 à 7 ans. Un autre point évidemment important: le cheval doit avoir un bon état de santé général et de bons aplombs; les quatre jambes doivent être sèches et saines, ce que je fais contrôler en plus par un vétérinaire. Mais ceci seulement au moment où je me suis décidé à un achat éventuel.
Lorsque le cheval sort de l’écurie, s’il montre de bonnes actions et satisfait aux points cités plus haut, je me le fais présenter sous la selle au cas où il aurait déjà été monté. S’il se présente également bien monté, sans s’encapuchonner (derrière la main) ou porter la tête trop haute (en dessus de la main) — ce qui est tout à fait inadéquat pour l’attelage — je vais plus loin. Mais revenons tout d’abord au port de la tête: un cheval qui doit servir à l’attelage marche de préférence avec l’encolure un peu en extension plutôt qu’il ait par avance des difficultés à « être à la rêne». Si de telles difficultés surgissent déjà sous la selle, ce cheval ne m’intéresse pas plus longtemps. Il faudrait trop de temps pour corriger cette défense contre la main, et ce problème ne resurgirait que trop rapidement sous le harnais; il arrive aussi que de tels chevaux ne soient jamais à la rêne une fois attelés.


 

chevaux hongrois

 

         Je préfère entre tous les chevaux qui recherchent naturellement un contact léger avec le mors et — ce qui est très important pour moi — qui sont tranquilles dans la bouche.
Je demande ensuite au propriétaire s’il serait possible d’équiper le cheval d’un harnais léger, Il est intéressant pour moi (et pour la suite du travail) de savoir s’il accepte le harnais. Je le harnache donc, apporte une longue guide (double longe) et longe un peu le cheval  celui-ci étant toujours équipé d’oeillères. ( la maison, j’essaie plus tard sans, mais pour commencer, je débute toujours avec des oeillères). Le meilleur moyen pour apprendre au chevaux à tirer, ce sont les pneus. On traîne le pneu accroché à une rallonge qui a été fixée au préalable aux traits. Si le cheval accepte cela sans devenir nerveux, il accepte aussi les guides sous la queue et dans les postérieurs sans ruer d’emblée. S’il montre en plus un bon pas et un bon trot dans une position correcte, on peut généralement l’acheter sans arrière-pensée. Ce qui ne veut naturellement pas dire qu’un tel cheval ne présentera pas de problèmes en attelage, car les véritables problèmes surgissent généralement plus tard.

Race et taille des chevaux

            Nous n’avons jusqu’à présent parlé que des chevaux tels que je les préfère et de l’idée je m’en fais. On peut mener des chevaux de n’importe quelle taille et de presque n’importe quelle race. Je menais par le passé des chevaux frisons avec succès; ils se prêtent très bien au sport d’attelage et sont très facile à atteler. Le grand avantage de ces chevaux est qu’ils conservent en général la même allure et le même mouvement, qu’on les attelle à deux ou à quatre. lis sont tous noirs et se complètent ainsi très bien. Les frisons ont un excellent caractère et sont tout à fait indiqués pour le débutant ou l’amateur qui veut faire plus ample connaissance avec l’attelage. Ils travaillent très bien et forment toujours un attelage particulièrement harmonieux. A l’époque où je menais encore des frisons, des problèmes de condition se posèrent lors de marathons longs et exigeants et pendant les grandes chaleurs, comme par exemple au Haras du Pin en 1979.
Ils existe bien sûr nombre d’autres races qui se prêtent à l’attelage. J’ai déjà dit que le cheval de selle est le plus intéressant pour moi; un large choix de chevaux s’offre ainsi, comme par exemple les holstein, trakehner, hannovriens, oldenbourgeois, hessois ainsi que les chevaux anglais, français, irlandais, etc, etc. En vérité, la race n’est pas un élément décisif, pourvu que le cheval se rapproche le plus possible de l’idéal du cheval d’attelage.

            Revenons aux chevaux de petite taille. George Bowman et nombre d’autres meneurs nous ont prouvé avec les welsh cobs que de tels chevaux peuvent aussi aller très bien. Cette race anglaise est élevée à la taille du poney et à la taille du cheval. Je ne parlerai pas ici des poneys, sans quoi mon propos risquerait de devenir trop long.

         Les petits chevaux et par exemple les frisons et les welsh cobs, tout comme les haflingers et les fjords norvégiens et plusieurs autres races, sont généralement peu rapides au pas. La taille en elle-même na pas nécessairement une influence déterminante, à condition que les chevaux soient forts et travailleurs. Les welsh cobs ne sont pas grands et sont tout de même dotés d’une endurance invraisemblable. On a pu le constater une fois de plus à Rome lors du Championnat International d’Attelage à Deux, lorsque l’anglais Paul Gregory remporta la victoire individuelle avec ses cobs rapides et forts. De par sa taille, il va tout à fait bien avec son attelage; c’est peut-être la raison pour laquelle je préfère mener de grands chevaux, étant moi même un homme grand et fortement constitué.


         N’oublions pas les lipizzans des différentes régions d’élevage; Bardos, Kolouch et depuis peu George Bowman mènent avec beaucoup de succès cette race plutôt trapue.

Où placer un cheval dans l’attelage à quatre?

         La place ne joue de prime abord pas un grand rôle. Lorsque j’achète un cheval, je ne détermine sa place dans l’attelage que plus tard. Il est clair que si un cheval est trop sur l’oeil et a peur de différentes choses, il ne convient pas comme volée: celui-ci doit avoir un peu plus de confiance envers le trafic et les choses qui lui sont étrangères. C’est un peu plus simple pour un timonier. Mes chevaux actuels s’adaptent tous partout, je peux les placer devant, derrière, à gauche et à droite. Evidemment, un cheval ira mieux devant que l’autre, un autre peut par contre mieux aller à droite qu’à gauche, mais en tout et pour tout, je peux les engager partout.

Comment parvenir à ce but?

         Je pense que ça vient du fait que chez nous, les chevaux sont beaucoup montés  je reviendrai sur ce point important pour l’attelage dans notre prochain article. Les chevaux bien mis sous la selle sont beaucoup plus faciles à atteler. En guise d’exemple, j’ai acheté il y a quelques années des chevaux formés en dressage jusqu’au niveau L ou M; je les ai harnachés, attelés, et quinze jours plus tard je participais avec eux au premier concours.

         J’ai acheté un cheval que j’ai baptisé Tassimo; âgé de 10 ans et formé en dressage jusqu’au niveau S. J’ai attelé ce cheval et l’ai pris avec moi la semaine suivante pour son premier concours à Breda, où j’ai participé avec lui au dressage et au parcours d’obstacles. Trois semaines plus tard, il a fait avec moi le voyage de la Suède où il a également pris part au dressage et au parcours d’obstacles comme cheval de volée.

         L’adaptation à l’attelage va très vite dans un cas pareil, le cheval ayant déjà l’expérience de la compétition; mais là aussi, des problèmes peuvent apparaître plus tard.

         J’insiste sur le fait qu’un cheval qui fait une très bonne impression au début peut devenir plus tard l’objet de nombreux soucis. J’ai déjà acheté des chevaux très tranquilles et sans problèmes pour commencer et qui devinrent nerveux et se mirent à ruer après une période assez longue. Ces chevaux n’avaient absolument aucun penchant pour l’attelage et je les ai revendus pour la selle.

         Dans mon prochain article, j’aurai l’occasion de parler des moyens de mieux comprendre ces problèmes d’assimilation, de la correction des difficultés nouvelles surgissant au cours des phases d’apprentissage et de l’entraînement des chevaux.

 

Tjeerd Velstra, In mémoriam Achenbach 1/1984

 


  Commentaires
-Vivement... par FranZiS (15/02/2009 18:04:10)
La suite :-D